Jour 13 en Transat 1981 : L’Art de Naviguer, Entre Préparation, Humilité et Souvenirs du Maroc

Introduction : Treize Jours Face à l’Océan, Treize Leçons de Vie

Le 27 novembre 1981 marquait notre treizième jour d’une Transat des Alizés qui ne cessait de nous enseigner. 

L’océan n’est pas qu’une étendue d’eau ; c’est un miroir qui reflète nos limites, nos aspirations, et parfois même, les souvenirs les plus lointains.

 Ce jour-là, entre le ballet des voiles, la rigueur de l’équipage et la contemplation de l’infini, notre journal de bord allait s’enrichir de réflexions profondes sur l’art de vivre en mer, l’importance cruciale de la préparation et les échos lointains d’une enfance marocaine.

La Vie à Bord : Discipline et Philosophie du Voyage

Au cœur de la nuit, vers 2 heures du matin, la routine de la navigation nous rappelait à l’ordre.

 Il fallait affaler le spi, cette grande voile légère, et la remplacer par le génois, plus adapté aux conditions de vent du moment. 

Ces manœuvres en pleine obscurité sont le quotidien d’une traversée, exigeant de chaque membre d’équipage une parfaite connaissance de soi et une discipline de fer.

Cette expérience en équipe était une véritable richesse. Pour moi, la vie sur un voilier n’était pas une question de survie à tout prix, cherchant à atteindre un objectif par n’importe quel moyen.

 Non, c’était une philosophie de vie, une manière d’être au monde. J’avais vu trop de ces bateaux où les équipages, après des traversées, arrivaient à destination épuisés, malades, et à bord de navires dont tout semblait à l’abandon.

 Je ne pouvais imaginer le bonheur d’une telle expérience. Au contraire, j’étais profondément heureux sur l’eau, surtout quand le bateau avançait bien, glissant avec élégance sur les vagues.

L’équipage, conscient des efforts de chacun, eut la gentillesse de me laisser dormir quatre heures d’affilée, un luxe inestimable en mer. 

Vers 7 heures du matin, depuis ma couchette, j’ai entrouvert un œil et aperçu Christian, mon coéquipier, plongé dans un sommeil profond. Je me suis levé discrètement pour prendre mon quart, ne voulant troubler son repos.

 Devant la timonerie, un rapide coup d’œil au baromètre confirmait une légère chute : un signe que le temps pourrait changer.

 Nous naviguions alors sous génois, grand-voile et artimon, un arrangement de voiles adapté à la situation.

L’Art de la Préparation et les Leçons des Concurrence

Une vérité universelle dans le monde de la voile est que le succès d’une croisière, ou d’une course, dépend en grande partie de la préparation minutieuse du bateau et de sa conception. 

À Casablanca, avant le grand départ, nous avions travaillé sans relâche, jusqu’à la dernière minute, sur des détails qui pouvaient paraître insignifiants.

 Mais en mer, chaque « petit détail » peut faire la différence entre une avarie et une navigation sereine.

J’avais eu l’occasion de visiter les bateaux de nos concurrents et j’avais été frappé par une observation : ceux qui se disaient les plus affûtés et les mieux préparés pour l’épreuve transatlantique montraient, en réalité, des lacunes évidentes en matière de préparation. 

Une leçon d’humilité, rappelant que l’apparence peut être trompeuse et que la mer ne pardonne pas le manque de rigueur.

Rencontre, Rêverie et Racines Marocaines

Vers 19 heures, notre solitude fut à nouveau rompue par une rencontre inattendue : le voilier de course Ty-Yann ». Ils étaient en difficulté, leur radar s’étant malencontreusement détaché du mât d’artimon.

 Un rappel des aléas techniques qui peuvent frapper n’importe qui, à tout moment, en plein océan.

De nouveau étendu sur ma couchette, je me laissais aller à la rêverie. 

Au milieu des flashs d’idées et de pensées qui sollicitent mon esprit, un souvenir inattendu surgit, tel une aubaine : un paysage de mon enfance. 

La distance physique était immense, mais l’esprit s’affranchissait des kilomètres. 

Une pensée instructive me ramenait à la sagesse du paysan, à l’image de mon père, reflet de la patience du jour. 

La vue de ces sentiers d’antan m’engageait encore vers une marche tranquille, marquée par le regard des aînés. 

La majesté immobile de la montagne de Tazekka m’apportait la blancheur apaisante de ces moments passés à l’orée des rigueurs de l’hiver, une image de pureté et de force, ancrée dans le cœur du Maroc.

Conclusion : L’Équilibre du Marin, Entre Présent et Mémoire

Le 27 novembre 1981 fut une journée où l’océan, loin d’être un vide, se révélait un espace de vie, de leçons et de profonds souvenirs. 

Il nous a rappelé l’importance capitale de la discipline et d’une préparation irréprochable, mais aussi que le bonheur en mer réside dans une philosophie du voyage, non dans la seule quête de l’arrivée.

 Au-delà des manœuvres et des caprices du baromètre, cette journée fut marquée par la découverte des failles techniques chez autrui et, plus intimement, par un voyage intérieur vers les racines, les valeurs de l’enfance et la sagesse paysanne.

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    Categories:

    Récit de mer, Aventure maritime, Transatlantique, Journal de bord, Voile, Philosophie de vie, Souvenirs d’enfance, Maroc

    Méta-description:

    Plongez Plongez dans le jour de la Transat des Alizés en 1981. Découvrez la philosophie d’une vie sur l’eau, l’importance cruciale de la préparation, une rencontre inattendue en pleine mer, et les réflexions profondes d’un marin marocain confronté à l’immensité et aux souvenirs de sa terre natale.

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